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DU TRADUCTEUR.

pecterions encore davantage le bon-sens d’un traducteur, qui, en n’employant, autant qu’il lui seroit possible, que le langage vulgaire, rendroit ainsi intelligible pour tous ce qu’il écrit sur des choses dont tous ont besoin ; et ce que nous respectons en ce genre, nous le prendrons pour modèle. Ces termes sans doute ne sont pas nobles ; mais il nous paroît encore plus ignoble de parler pour n’être pas entendu, et d’attacher sa gloire à des mots. C’est une petite ressource qu’il faut laisser à ces écrivains stériles et infortunés, qui, n’ayant pas la faculté de produire par eux-mêmes des idées neuves, et qui néanmoins voulant absolument créer quelque chose, sont réduits à inventer des mots, et se donnent ainsi une sorte d’existence. D’après cette règle, préférable à celles de l’orgueil scientifique, nous laisserons aux plantes très connues, qui ont des noms très connus aussi, ces noms mêmes que le vulgaire leur a donnés. Et nous emprunterons de la langue savante les noms de celles qui, étant plus rares, ou moins à l’usage du grand nombre, n’en ont point encore dans la langue commune ; car nous n’écrivons point pour les savans, qui n’ont pas besoin de nous ; mais pour les ignorans nos semblables, et dont le goût, aussi peu formé que le nôtre, ne s’accommode pas aisément d’un livre français qui parle grec. Au reste, pour bien ap-