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des anciens.

prompte mort ne les mette à l’abri des vicissitudes de la fortune. Quant à cette partie de la fable qui dit que Diomède fut tué par son hôte même, elle est des-

    Toute religion arrosée du sang de ses défenseurs, n’en pousse que plus vigoureusement ; et tout moyen violent, employé pour déraciner même un préjugé absurde, ne fait que le planter plus profondément. Il a le double inconvénient de donner trop d’importance à des bagatelles, et de bander les ressorts du fanatisme, en l’irritant. Quelquefois aussi tels sectaires, qui n’eussent été que ridicules, si on les eut laissé dire, paroissent et deviennent même des hommes sublimes si, en les punissant trop sévèrement, on leur fournit l’occasion de déployer un certain courage qui a toujours quelque chose d’imposant. Et comme ce fut ainsi que les fanatiques défenseurs de la vraie religion, en brûlant des hérétiques, plantèrent l’hérésie.

    Il n’est que trois bons moyens pour extirper un préjugé de cette dernière espèce.

    1.o La raillerie, le ridicule, moyen aussi juste qu’efficace ; car on n’est pas obligé de raisonner avec des hommes déraisonnables, avec des sots, des fous ou des fripons, les trois espèces d’hommes qui vivent de préjugés, et qui défendent par des voies de fait ce dont ils vivent ; ce que vingt