Page:Bacon - Œuvres, tome 4.djvu/287

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manière de commencer donne à l’esprit de l’étendue, de la force, de la justesse et de la netteté. Elle fait qu’il n’est pas long-temps dupe des aperçus éblouissans, et qu’il ne s’effraie point à la vue d’un assemblage très compliqué. Car le méchanicion, sur-tout celui qui exécute beaucoup, est puni presque sur-le-champ, de ses moindres erreurs, par les dépenses inutiles où elles le jettent, par la perte de son temps, de ses peines, et quelquefois de sa réputation ; attendu que ses méprises sont visibles et palpables, même pour les hommes-machines. Il a donc un intérêt vif et continuel à imaginer les choses telles qu’elles sont, et non a les considérer seulement par le côté brillant, comme on le fait trop souvent dans tous les genres bavards et dans tous les arts d’étalage. Or, cette habitude qu’il a intérêt de contracter, il la contracte bientôt, parce qu’il exerce continuellement la faculté respective dont il a un continuel besoin. Cet univers n’est qu’une grande machine et il n’est qu’un méchanicien qui puisse bien voir ce qu’il est, imaginer nettement ce qu’il peut devenir, et se contenter de ce qu’on y trouve. Car c’est parce qu’on veut trouver dans la nature ce qui ne s’y trouve point, qu’on voit les choses, non telles qu’elles sont, mais telles qu’on voudroit qu’elles fussent ; et dussé-je paroître séduit par un préjugé, je ne puis me persuader que si, une fois