Page:Baillet - La Vie de monsieur Des-Cartes, première partie.djvu/148

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y avoit été maintenuë jusqu’alors dans un état aussi florissant, qu’elle étoit au têms de sa mort, par les soins de ses héritiers, et particuliérement de son illustre disciple Jean Képler mathématicien de l’empereur. Monsieur Descartes ne trouva rien de plus agréable durant ce séjour, que la conversation de ceux qui l’informérent des particularitez de la vie de ce grand astronome, qui étoit venu autrefois de Danemarck s’habituer à Prague avec toute sa famille. Si nous en croyons quelques auteurs, il prit un plaisir sensible à entendre parler de ses belles inventions, et à voir ses grandes machines que ses héritiers luy permirent d’éxaminer tout à loisir.

Ces deux circonstances rapportées par le Sieur Borel, paroîtront assez plausibles à ceux qui se contenteront de juger du fait par la seule curiosité de Monsieur Descartes. Mais on les trouvera plus que douteuses, lorsqu’elles seront éxaminées sur la vérité de l’histoire. Il est difficile que Monsieur Descartes ait pû se procurer des conférences doctes et curieuses avec les enfans, ou les parens de Tyco, s’il est vray qu’il n’en restoit point alors qui fussent en état de répondre à sa curiosité, ou qui demeurassent actuellement à Prague. Tyco avoit laissé en mourant six enfans qui se portérent tous pour héritiers : et ils eurent soin de publier quelques-uns de ses ouvrages posthumes, et de les dédier en leur nom aux empereurs Rodolphe et Ferdinand en mil six cent deux, et mil six cent vingt-six. Mais nous apprenons d’un mathématicien saxon nommé Wilhelmus Johannis, que dés l’an mil six cent quinze, aprés avoir fait toutes les enquêtes possibles dans la ville de Prague sur les fils et les filles de Tyco-Brahé, il n’avoit trouvé personne qui eût pû luy en dire des nouvelles.

Monsieur Descartes aura-t-il été plus heureux dans ses recherches ? Il y avoit alors un fils de Tyco richement pourvû en Bohéme : mais il demeuroit en Province. De sorte qu’il ne pouvoit rester à Prague que le Baron De Tengnagel gendre de Tyco, que Monsieur Descartes pût voir sur les sciences. Aussi Tengnagel étoit-il homme de lettres, et mathématicien : mais je doute qu’étant demeuré fidelle à l’Empereur