Page:Baillet - La Vie de monsieur Des-Cartes, première partie.djvu/291

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comme à une personne trés-étroitement liée à M Descartes, et qui peut beaucoup sur son esprit. Au reste je crois connoître assez le Sieur Ferrier pour vous répondre de la disposition de son cœur. Je l’ay vû souvent ; j’ay eu de fréquentes conversations avec luy. Mais il ne m’a presque jamais entretenu que de M Descartes, et toujours avec tant de témoignages d’estime, et des éloges si extraordinaires, que si je n’avois connu d’ailleurs le mérite de M Descartes, je n’aurois pû me défendre de considérer des loüanges si magnifiques et si fréquentes, comme de véritables hyperboles. Jamais il ne m’en a parlé que comme d’une divinité descenduë du ciel pour le bien du genre humain, prétendant n’admirer que lui dans le monde, et protestant qu’il luy est redevable de toutes choses.

Enfin je l’ay toujours trouvé si uniforme et si constant dans son estime, dans son affection, et dans le zéle qu’il a pour son service, qu’il y auroit dequoi être surpris du refroidissement de M Descartes, s’il n’avoit quelque autre raison que l’on ne connoît pas icy. Pour moy si j’avois à me faire mettre en réputation, je n’en voudrois pas confier le soin à d’autres qu’au Sieur Ferrier : et je serois sûr de l’acquerir au plus haut degré, s’il l’entreprenoit avec le zéle qu’il a pour M Descartes, à qui vous ferez connoître, si vous le jugez à propos, qu’elle est ma disposition à son égard, et la sincérité avec laquelle je suis son tres-humble serviteur. Le Sieur Ferrier souhaite qu’on luy renvoye le pacquet au cas qu’on ne le rende point surement à M Descartes en Hollande, ou qu’on ne puisse le lui faire tenir éxactement en Angleterre, où on luy a mandé qu’il avoit dessein d’aller dans peu de têms. Etc.

M Reneri ne manqua point de faire tenir le pacquet à M Descartes, qui fut surpris d’y trouver un si grand nombre de lettres sur le même sujet. Il fut trés-satisfait de voir des témoignages de tant d’amis en faveur du Sieur Ferrier. Mais de crainte que la facilité qu’il avoit à l’excuser en leur considération ne leur donnât leu de croire que le Sieur Ferrier ne fût innocent dans son malheur, il prit la peine de récrire à tous en particulier, faisant les uns juges de sa conduite, et donnant aux autres des éclaircissemens sur celle de Ferrier, qui ne leur avoit pas été assez connuë. Il écrivit