Page:Baillet - La Vie de monsieur Des-Cartes, première partie.djvu/308

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condition, il luy dit que l’université ou collége de Déventer est une academie peu renommée à la vérité, mais où les professeurs ont plus de gages, et vivent plus commodément qu’à Leide ni à Franecker, où M Reneri eût pû avoir place auparavant, s’il ne l’eût point refusée ou négligée.

M Descartes étant à Déventer se remit tout sérieusement à l’étude, et reprit le soin de continuer divers ouvrages qu’il avoit interrompus, et particuliérement sa dioptrique et son traitté du monde. Il s’appliqua tout de nouveau à la connoissance des choses célestes, afin de s’en acquiter avec encore plus d’exactitude : et il pria le P Mersenne de lui envoyer ce qu’on disoit que le P Scheiner faisoit imprimer touchant les parhélies qu’il avoit observées à Rome, au sujet dequoi cét auteur devoit traitter de divers autres phénoménes. Il est vray que ce pére travailloit actuellement à cét ouvrage : mais il apporta tant de delais à sa publication, qu’il le laissa encore manuscrit à sa mort, qui arriva cinq mois aprés celle de M Descartes.

Aprés quelques mois d’application particuliére aux observations astronomiques, il s’apperçut de la nécessité d’étudier à fonds la nature des cométes, et il écrivit au P Mersenne pour luy mander que s’il sçavoit quelque auteur qui eût particuliérement recuëilli les diverses observations qui avoient été faites des cométes jusqu’alors, il l’obligeroit de lui en donner avis. Car depuis deux ou trois mois, dit-il, je me suis engagé fort avant dans le ciel ; et aprés m’être satisfait touchant sa nature et celle des astres que nous y voyons, et plusieurs autres choses que je n’eusses pas seulement osé espérer il y a quelques années : je suis devenu si hardi, que j’ose maintenant chercher la cause de la situation de chaque étoile fixe. Car encore qu’elles paroissent fort irréguliérement éparses çà et là dans le ciel, je ne doute pourtant pas qu’il n’y ait entre-elles un ordre naturel qui est régulier et déterminé. La connoissance de cét ordre est la clef et le fondement de la plus haute et plus parfaite science que les hommes puissent avoir touchant les choses matérielles, d’autant que par son moyen on pourroit connoître a priori toutes les diverses formes et essences des corps terres