Page:Baillet - La Vie de monsieur Des-Cartes, première partie.djvu/341

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dans Kepler. Aprés toutes ces précautions il se mit à la composition de son petit traité de la nége, de la pluie, et de la grêle, qui fait aujourd’hui le sixiéme discours de ses météores. Il s’attacha particuliérement à expliquer comment les petites parties de glace qui composent les nuës s’entassent en divers floccons ; comment ces floccons se grossissent, et tombent tantôt en nége, tantôt en grêle, et tantôt en pluie. D’où vient la figure de pyramide ou de pain de sucre à la grêle, et celle de rouë ou d’étoile de six rays à la nége. Il éxamina tout ce que nôtre curiosité peut nous faire souhaiter sur cette matiére avec sa briéveté et sa netteté ordinaire : et il parût si content des observations que la nége héxagone luy fit faire, qu’il témoigna depuis à M Chanut, qu’il auroit souhaité que toutes les expériences dont il avoit besoin pour le reste de sa physique pussent luy tomber ainsi des nuës , et qu’il ne fallût que des yeux pour les connoître.

M Descartes ne se souvenant plus des incommoditez que le commerce de ses correspondans avoit reçûës de sa solitude de Déventer, voulut retourner en cette ville pour se dégager des visites qu’il étoit obligé de recevoir à Amsterdam. Aprés cinq ou six mois de retraite et d’étude il passa en Frise vers la fin de l’automne, et alla se retirer à Liewarden, ville principale de la province à deux lieuës de Franecker, où il avoit demeuré dés l’an 1629. Là, il fit réfléxion sur la priére que M De Zuytlichem luy avoit faite de luy donner quelque chose sur les méchaniques. M De Zuytlichem dont le nom étoit Constantin Huyghens seigneur de Zuytlichem, de Zeelhem, et de quelques autres lieux, se trouvoit depuis quelques années au nombre des plus intimes d’entre les amis de M Descartes. C’étoit un gentilhomme hollandois originaire du Brabant, conseiller et sécrétaire des commandemens du Prince D’Orange, homme fait également pour la cour, pour la guerre, et pour le cabinet ; homme d’un esprit délicat, aisé, agréable, appliqué, profond, mais libre et dégagé ; d’une érudition fort diversifiée dans les langues et les sciences qu’il possédoit, et dans les arts libéraux dont il sçavoit la pratique autant que la spéculative. Il avoit conçû d’abord pour M Descartes, outre une estime toute