Page:Baillet - La Vie de monsieur Des-Cartes, première partie.djvu/91

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1604 ne termina point ses bontez pour eux à la simple restitution de ce qu’ils avoient perdu par leur retraitte. Leur présence fit réveiller en lui le dessein qu’il avoit conçeu depuis sa conversion, de fonder un collége dans lequel la noblesse françoise pût être élevée dans les bonnes lettres et dans les maximes de la véritable religion. Ce prince jetta les yeux sur eux pour l’accomplissement de ce grand dessein, et ils furent servis tres-efficacement dans une conjoncture si favorable par le Sieur De La Varenne, qui étoit le plus zélé de leurs amis, et l’un des plus avancez à la cour dans la faveur du roy. Cét homme, qui s’étoit élevé par divers degrez jusques à la charge de controlleur général des postes, s’étoit piqué dés auparavant de rendre riche et célébre la petite ville de La Fléche en Anjou, parce que c’étoit le lieu de sa naissance, et que le roy lui en avoit donné le gouvernement. Il venoit d’y faire établir un présidial, une election, et un grenier à sel, le tout de nouvelle création, lorsqu’on lui présenta cette occasion de faire réussir les desirs qu’il avoit témoignez d’y voir un collége de jésuites. La chose ne fut pas plûtôt proposée au roy qu’elle fut accordée. Ce bon prince ayant choisi ce lieu, qui étoit celui de sa conception, et l’héritage de ses ancêtres, pour être le glorieux monument de la tendresse qu’il avoit pour ces péres, leur donna son palais pour en faire un collége, avec de grandes sommes d’argent pour y rendre les bâtimens commodes et magnifiques. Il le dota trés richement par un revenu assuré de onze mille écus d’or, avec assignation de gages pour un médecin, un apoticaire, et un chirurgien, qui devoient servir le collége gratuitement. Afin que les ecoliers ne fussent pas obligez d’aller étudier ailleurs les sciences qui ne s’enseignent pas ordinairement chez les jésuites, il y établit encore quatre professeurs publics de jurisprudence, quatre de médecine, et deux d’anatomie ou de chirurgie, avec de gros apointemens dans la dépendance des péres du collége. Il laissa aussi des fonds pour entretenir de toutes choses vingt-quatre pauvres etudians ; et pour marier tous les ans douze pauvres filles qu’on devoit élevér dans la piété. Enfin il avoit resolu d’y fonder l’entretien de cent gentilshommes pour les dresser dans tous les éxercices