Page:Bainville - Bismarck.djvu/133

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ailleurs, ces sentiments-là on les éprouvait alors à Berlin, et on ne s’en cachait pas, car l’indemnité n’était pas acquittée tout entière. Plus tard, on changera de langage et de politique. » Plus tard, en effet, comme on sait, Bismarck n’hésita pas à reconnaître dans ce Gambetta, si longtemps redouté, un allié involontaire, tel que Thiers l’avait été. La politique de Gambetta favorisera en 1877 ses intérêts et ses vues comme celle de Thiers les avait servis en 1872-1873. M. de Gontaut-Biron a très bien compris cela. Il serait trop long d’entrer dans le détail des négociations qu’il conduisit pour la « libération du territoire » et dans lesquelles il remarqua que toute la bonne volonté montrée par le cabinet de Berlin tendait à rendre plus forte la situation de M. Thiers en France et dans l’opinion. Il y a là, sans doute, un chapitre d’histoire trop peu connu. M. de Gontaut-Biron, d’un trait qui pour être léger n’en est pas moins cruel, indique la vanité avec laquelle M. Thiers s’attribua tout le mérite d’une affaire où son habileté eut la moindre part. M. de Gontaut, en toute indépendance, éclaira ici son gouvernement sur le fond des choses. Avec une rude franchise, il communiquait à M. de Rémusat ces observations qui sont capitales : « Je dois ajouter que notre situation intérieure donne plus de confiance à l’Allemagne. Le désir de consolider la situation personnelle de M. Thiers a beaucoup contribué au succès de la négociation pour la libération du territoire. »

D’ailleurs, M. de Gontaut-Biron jugeait M. Thiers