Page:Bainville - Heur et Malheur des Français.djvu/623

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résultat. La déclaration de guerre des États-Unis, si longtemps espérée de Napoléon, qui survint à ce moment-là et qui était due à la tyrannie maritime de l’Angleterre bien plus qu’aux efforts de notre diplomatie, ne pouvait même plus changer la résolution du gouvernement britannique. Tout indiquait d’ailleurs un vaste retournement des choses en faveur de la cause dont l’Angleterre était restée, à un moment, le champion presque unique. La propagande nationaliste portait ses fruits en Allemagne. La Prusse, tout en protestant de sa fidélité à notre égard, avait tourné ses obligations et reconstitué en secret ses forces militaires. Un corps prussien mêlé à nos troupes et commandé par le général d’York passa aux Russes. Cette défection causa une sensation immense en Allemagne et hâta le repli des derniers débris de l’armée française qui ne s’arrêta plus qu’à l’Elbe. Alors le gouvernement prussien leva le masque et suivit l’opinion publique qui voulait la guerre de libération et d’indépendance.

Napoléon voulait considérer sa défaite de Russie comme un simple accident. Il pensait qu’en Allemagne il lui serait toujours facile de battre les Prussiens et les Russes. Ayant levé et organisé une armée nouvelle, il les battit, en effet, à Lutzen et à Bautzen. La campagne de 1813 commençait bien. Cependant il se méfiait, non sans raison, de l’Autriche, et, au lieu de poursuivre ses premiers succès, il accepta un armistice afin d’être prêt à battre un troisième adversaire. Il ne craignait pas une coalition austro-prusso-russe et il préférait en finir d’un coup, se disant qu’il avait assez de gages entre les mains pour obtenir, avec l’Angleterre elle-même, une paix générale avantageuse. La victoire de Dresde, le 27 août, parut encore lui donner raison. Mais, l’un après l’autre, mal servis par leurs contingents de la Confédération germanique, plusieurs de ses lieutenants se firent battre et détruisirent ses plans. Revenu sur Leipzig, pour empêcher les coalisés de s’y réunir, Napoléon y livra une bataille de trois jours, au cours de laquelle nos auxiliaires saxons passèrent à l’ennemi. Cette immense bataille perdue, et toute l’Allemagne avec elle, il fallut se replier sur le Rhin. En novembre, ce qui avait été la Grande Armée entrait à Mayence après avoir dû s’ouvrir un passage à Hanau sur les Bavarois qui avaient trahi à leur tour.