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CONSÉQUENCES POLITIQUES DE LA PAIX

guerre. Elle les avait reçus tout de suite. Elle était en possession. Elle goûtait sans scrupules et sans remords ce que lui donnait cette paix « juste », si juste qu’à travers le discours de M. Lloyd George elle finissait par sembler immatérielle.

Elle l’est, en effet, dans toute la mesure où elle n’est pas une paix politique. Sans doute les auteurs d’un traité n’ont pas coutume de dire en public les raisons pour lesquelles ils ont pris tel parti plutôt que tel autre. Lorsqu’il s’agit de coalisés qui une fois la victoire acquise, obéissent à des intérêts divers, cette dissimulation est plus naturelle encore. Le langage de l’idéalisme est commode et il était déjà venu aux lèvres des vainqueurs de 1815. Nous savons aujourd’hui quels avaient été les calculs, les soucis, les différends des Alliés de l’autre siècle. Déjà, nous sommes à peine moins renseignés sur la Conférence de Paris que sur le Congrès de Vienne. Les divulgations sont venues très vite. Qu’a-t-on révélé qui ne fût parfaitement clair ? Le traité de Versailles parle plus haut que tout. Servis par un instinct puissant, par la tradition de l’Amirauté et du Foreign Office et par des circonstances favorables, des intérêts très clairs, les intérêts maritimes de la Grande-Bretagne, avaient été satisfaits tout de suite et sans discussion. Le reste ne s’était inspiré d’aucune conception d’ensemble. Et le reste, c’était la constitution d’une Europe nouvelle. Rien de moine. Au Conseil suprême,