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contrôles effectués à travers l’œilleton. Votre courrier est lu, votre cellule régulièrement inspectée.

Des hommes et des femmes font des mois, voire des années de prison préventive avant d’être jugés innocents. Cinq personnes ? Dix ? Cent ? Vous êtes très loin du compte : 2 500 ont été jugées innocentes entre 1990 et 2000, c’est-à-dire ont bénéficié d’un non-lieu, d’une relaxe ou d’un acquittement. 2 500 personnes en dix ans ont été inculpées pour rien. Cela fait combien de gens actuellement vivants dans ce pays qui ont été emprisonnés par erreur ? Pour un homme derrière les barreaux, combien de ses proches qui voient leur vie dévastée ?

Cela dit, c’est une idée très communément admise que la prison est inhumaine et parfaitement odieuse pour un innocent, mais qu’elle est justifiée pour les coupables. Voilà qui est irrationnel. Qu’elle soit « injuste » ou « juste » peut encore se concevoir, mais odieuse pour les premiers et pas pour les seconds relève de la seule mauvaise foi.

L’innocent, certes, est injustement puni. Qu’on le fasse s’accroupir nu et se pencher en avant en toussant est dégradant, insupportable. Mais c’est aussi dégradant pour nous qui le savons et tolérons ce qui ne peut être toléré. De telles pratiques sont révoltantes comme la condamnation à une vie sexuelle de misère, comme l’écrasement des familles, comme toutes les humiliations distillées méthodiquement entre quatre murs, comme l’incarcération dans sa totalité. C’est aussi inhumain et dégradant pour le supposé coupable que pour l’innocent.


Les défenseurs de l’incarcération ont deux arguments. Le premier c’est qu’il faut punir. Une faute doit être expiée. Les bandits sont des bandits, un pénitentier un pénitencier, on n’a rien à faire de ceux qu’on enferme. Ils ont fait souffrir, ils doivent souffrir à leur tour. Il faut bannir à l’intérieur des frontières (faute de mieux) celui qui ne respecte pas les lois. On le supprime purement et simplement. Dans cette vision qui pourrait être cohérente on voit