Page:Bakounine - Œuvres t1.djvu/181

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vue absolu que l’intérêt exclusif de l’espèce, on dirait que l’instinct social est le bon, et l’instinct individuel, et tant qu’il lui est opposé, le mauvais. Chez les fourmis, chez les abeilles, c’est la vertu qui prédomine, parce que l’instinct social semble en eux absolument écraser l’instinct individuel. C’est tout le contraire dans les bêtes féroces, et en général, on peut dire que c’est plutôt l’égoïsme qui triomphe dans le monde animal. L’instinct de l’espèce, au contraire, ne s’y réveille que par courts intervalles et ne dure que le temps nécessaire à la procréation et à l’éducation d’une famille.

Il en est autrement dans l’homme. Il paraît et cela est une des preuves de sa grande supériorité sur toutes les autres espèces d’animaux — que les deux instincts opposés : l’égoïsme et la sociabilité, sont en lui et beaucoup plus puissants tous les deux et beaucoup moins séparables que chez tous les animaux d’espèces inférieures : il est plus féroce dans son égoïsme que les bêtes les plus féroces, et plus socialiste en même temps que les abeilles et les fourmis.

La manifestation d’une plus grande puissance d’égoïsme ou d’individualité dans un animal quelconque, est une preuve indubitable d’une plus grande perfection relative de son organisme, le signe d’une intelligence supérieure. Chaque espèce d’animaux est constituée comme telle par une loi spéciale, c’est-à--