Page:Bakounine - Œuvres t1.djvu/211

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Voilà une condition qui ne se réalise ni facilement ni souvent. Dans l’histoire de chaque pays, les époques qui offrent un assemblage considérable d’hommes éminents sont marquées comme des époques extraordinaires et qui resplendissent à travers les siècles. Ordinairement, dans les régions du pouvoir, c’est l’insignifiance, c’est le gris qui domine et souvent, comme nous l’avons vu dans l’histoire, c’est le noir et le rouge, c’est-à-dire tous les vices et la violence sanguinaire qui triomphent. Nous pourrions donc en conclure que, s’il était vrai, comme cela résulte clairement de la théorie de l’État soi-disant rationnel ou libéral, que la conservation et la durée de toute société politique dépendent d’une succession d’hommes aussi remarquables par leur intelligence que par leur vertu — de toutes les sociétés actuellement existantes, il n’en est pas une seule qui n’aurait dû, depuis longtemps, cesser d’exister. Si nous ajoutons à cette difficulté, pour ne point dire impossibilité, celles qui surgissent de la démoralisation toute particulière attachée au pouvoir, les tentations extraordinaires auxquelles sont infailliblement exposés tous les hommes qui tiennent en leurs mains le pouvoir, l’effet des ambitions, des rivalités, des jalousies et des cupidités gigantesques qui assaillent jour et nuit précisément les plus hautes positions, et contre lesquelles ne garantissent ni l’intelligence, ni même