Page:Bakounine - Œuvres t1.djvu/316

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tres, la civilisation et la culture de l’esprit, toutes choses qui sont immenses au point de vue humain, passager et terrestre, mais qui devant l’éternité, devant l’immortalité, devant Dieu sont égales à zéro. La plus grande sagesse humaine n’est-elle point folie devant Dieu ?

Une légende de l’Église orientale raconte que deux saints anachorètes s’étant emprisonnés volontairement pendant quelques dizaines d’années dans une île déserte, s’isolant même l’un de l’autre et passant nuit et jour dans la contemplation et dans la prière, étaient arrivés à ce point qu’ils avaient même perdu l’usage de la parole ; de tout leur ancien dictionnaire, ils n’avaient conservé que trois ou quatre mots qui réunis ensemble ne présentaient aucun sens, mais qui n’en exprimaient pas moins, devant Dieu, les aspirations les plus sublimes de leurs âmes. Ils vivaient naturellement de racines comme les bêtes herbivores. Au point de vue humain, ces deux hommes étaient des imbéciles ou des fous, mais au point de vue divin, à celui de la croyance en l’immortalité de l’âme, ils se sont montrés des calculateurs bien plus profonds que Galilée et Newton. Car ils ont sacrifié quelques dizaines d’années de prospérité terrestre et d’esprit mondain pour gagner la béatitude éternelle et l’esprit divin.

Donc il est évident qu’en tant que doué d’une âme immortelle, d’une infinité et d’une liberté inhérentes