Page:Bakounine - Œuvres t2.djvu/213

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sentes la révolution triompherait immanquablement, ils veulent à toute force empêcher la révolution.

k) Cette situation singulière entre deux ennemis, dont l’un — les monarchistes — est condamné à disparaître, et l’autre — les révolutionnaires socialistes — menace d’arriver, impose aux jacobins, aux socialistes bourgeois et aux communistes de l’État, une dure nécessité : celle de s’allier secrètement, tacitement, avec la réaction d’en haut contre la révolution d’en bas. Ils ne craignent pas autant cette réaction que cette révolution. Voyant en effet que la première est excessivement affaiblie, au point de ne pouvoir plus exister qu’avec leur consentement, ils s’allient avec elle momentanément et s’en servent d’une manière |5 très sournoise contre la seconde.

Cela explique la réaction violente qui de leur consentement règne aujourd’hui à Paris. Cela explique pourquoi on retient, on ose retenir illégalement Rochefort en prison. Avez-vous remarqué le mutisme de toute l’opposition radicale, et particulièrement le silence de Gambetta, lorsque Raspail a réclamé sa mise en liberté ? Seul le vieux Crémieux a prononcé un misérable discours juridique ; les autres, pas un mot. Et pourtant la question était bien claire : il s’agissait de la dignité et du droit du Corps législatif tout entier, de la dignité et du droit de la représentation nationale violés cyniquement en la personne du député Rochefort par le pouvoir exécutif. Le silence de la gauche républicaine ne signifiait-il pas deux choses : d’abord c’est que tous ces Jacobins détestent et craignent Rochefort comme un homme qui jouit, à raison ou à tort, des sympathies et de la confiance de la vile multitude ; que tous, comme des hommes politiques, expression favorite de Gambetta,