Page:Bakounine - Œuvres t2.djvu/228

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ne se soucie pas beaucoup, et ne pouvant s’en servir, ne pouvant détourner la passion patriotique, unitaire et vaniteuse des Allemands, il doit la satisfaire, — et il ne peut la satisfaire qu’au détriment de la France, qu’en lui arrachant au moins un milliard, et deux provinces : la Lorraine et l’Alsace, et en lui imposant, pour se garantir contre ses vengeances à venir, une dynastie, un régime et des conditions telles, qu’elle soit affaiblie, enchaînée et empêchée de bouger pour longtemps. Car la presse allemande est unanime sur ce point, et elle a mille fois raison : que l’Allemagne ne peut pas faire tous les deux ans des sacrifices inouïs pour maintenir son indépendance. Il est donc absolument nécessaire pour la nation allemande, qui prétend occuper aujourd’hui la position dominante de la France en Europe, de réduire la France précisément à l’état dans lequel cette puissance a maintenu jusqu’à cette heure l’Italie, d’en faire une vassale, une vice-royauté de l’Allemagne, du grand Empire allemand.

Telle est donc la situation du roi de Prusse et de Bismarck. Ils ne peuvent pas retourner en Allemagne sans avoir arraché à la France deux provinces, un milliard, et sans lui avoir imposé un régime qui leur garantisse sa résignation et sa soumission. Mais tout cela ne peut être arraché à la France qu’à Paris. Les Prussiens sont donc forcés de prendre Paris. Ils savent fort bien que ce n’est pas facile du tout. Aussi font-ils des efforts inouïs pour doubler leur armée, afin d’écraser littéralement Paris et la France. Pendant que la France s’organise, la Prusse ne dort pas non plus, — elle s’organise aussi.

Voyons maintenant laquelle de ces deux organisations promet les meilleurs résultats.