Page:Bakounine - Œuvres t2.djvu/315

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et politique de l’État lui manquera, — l’État et toute la constitution juridique, la défense de la propriété par l’État, le droit de famille et le droit d’héritage y compris, devant nécessairement disparaître dans l’immense tourbillon de l’anarchie révolutionnaire. Il n’y aura plus de droits ni politiques ni juridiques — il n’y aura que des faits révolutionnaires.

Mais ce sera la guerre civile, direz-vous ? La propriété individuelle n’étant plus garantie par aucune autorité supérieure, et n’étant plus défendue que par la seule |61 énergie du propriétaire, chacun voudra s’arroger (sic) du bien d’autrui, les plus forts pilleront les plus faibles. Mais qui empêchera les plus faibles de s’associer entre eux pour piller à leur tour les plus forts ?

Oui, ce sera la guerre civile. Mais pourquoi stigmatisez-vous, pourquoi craignez-vous tant la guerre civile ? Je vous demande, l’histoire à la main, est-ce la guerre civile, ou bien l’ordre public imposé par une autorité tutélaire quelconque, d’où sont sortis les grandes pensées, les grands caractères et les grandes nations ? Pour avoir eu le bonheur d’éviter la guerre civile pendant vingt ans, n’êtes-vous pas tombés si bas, vous grande nation, que les Prussiens ne font de vous qu’une bouchée ? Pour revenir aux campagnes, aimez-vous mieux voir vos dix millions de paysans, unis comme un seul homme, en une masse unanime et compacte contre vous, par la haine que leur inspireront vos décrets et vos violences révolutionnaires ; ou bien divisés entre eux par cette révolution anarchique, ce qui vous permettra de vous former un parti puissant parmi eux ? Mais ne voyez-vous donc pas que les paysans sont si arriérés, précisément parce que la guerre civile n’a point encore divisé les campagnes. Les masses compactes sont des troupeaux