Page:Bakounine - Œuvres t2.djvu/370

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chacun n’obéissant que parce que le chef du jour ne lui commande que ce qu’il veut lui-même.

Voilà la discipline vraiment humaine, la discipline nécessaire à l’organisation de la liberté. Telle n’est point la discipline prônée par vos |10 républicains hommes d’État. Ils veulent la vieille discipline française, automatique, routinière et aveugle. Le chef, non élu librement et seulement pour un jour, mais imposé par l’État pour longtemps sinon pour toujours, commande, et il faut obéir. Le salut de la France, vous disent-ils, et même de la liberté de la France, n’est qu’à ce prix. L’obéissance passive, base de tous les despotismes, sera donc aussi la pierre angulaire sur laquelle vous allez fonder votre république.

Mais si mon chef me commande de tourner les armes contre cette république, ou de livrer la France aux Prussiens, dois-je lui obéir, oui ou non ? Si je lui obéis, je trahis la France ; et si je désobéis, je viole, je brise cette discipline que vous voulez m’imposer comme l’unique moyen de salut |11 pour la France. Et ne dites pas que ce dilemme, que je vous prie de résoudre, soit un dilemme oiseux. Non, il est tout palpitant d’actualité, car c’est celui dans lequel se trouvent pris à cette heure vos soldats. Qui ne sait que leurs chefs, leurs généraux et l’immense majorité de leurs officiers supérieurs, sont dévoués corps et âme au régime impérial ? Qui ne voit qu’ils conspirent ouvertement et partout contre la république ? Que doivent faire les soldats ? S’ils obéissent, ils