Page:Bakounine - Œuvres t2.djvu/79

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

n’aurait qu’à désigner aux gouvernements libéraux de l’Europe tel émigré polonais ou russe comme un assassin, un faussaire ou un voleur, pour se le faire livrer ! Ce serait trop commode, vraiment, et trop dangereux surtout, parce que ce serait le meilleur moyen d’appliquer à toute l’Europe libérale et civilisée le système barbare du gouvernement moscovite, qui ne s’est jamais arrêté ni devant les calomnies ni devant le mensonge. »


En mars, Bakounine vint de Locarno à Genève, pour s’y occuper, avec son vieil ami Ogaref, d’une organisation nouvelle de la propagande révolutionnaire russe, et de la réapparition du journal le Kolokol (Alexandre Herzen venait de mourir). Ce fut pendant ce court séjour à Genève qu’il écrivit, pour essayer de soulever l’opinion publique en Suisse contre les manœuvres policières et gouvernementales, une brochure dans laquelle il reproduisait, avec plus de développement, les idées exprimées dans l’article qu’on vient de lire. Dans cet article, il avait parlé de « l’ours de Saint-Pétersbourg » : il intitula sa brochure Les Ours de Berne et l’Ours de Saint-Pétersbourg, et ce fut dans la bouche d’un citoyen suisse qu’il imagina de placer ses doléances et ses revendications, au moyen de ce sous-titre : Complainte patriotique d’un Suisse humilié et désespéré.

Lorsqu’il reprit le chemin de Locarno, le 18 avril, il s’arrêta chez moi à Neuchâtel, et me remit son manuscrit, en me demandant de le faire imprimer à mille exemplaires, si je me souviens bien[1] ; en même temps, il me donna toute liberté de le retoucher et de l’abréger :

  1. Ayant dû abandonner, en août 1869, mes fonctions dans l’enseignement public, j’étais alors, momentanément, gérant de la petite imprimerie G. Guillaume fils, à Neuchâtel.