Page:Bakounine - Œuvres t3.djvu/181

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ainsi que par les servitudes imposées aux cultivateurs de la terre ; et dans les villes, par l’organisation corporative des métiers : |268 privilèges, servitudes et organisation qui, datant du moyen âge, entravaient l’émancipation définitive de la classe bourgeoise.

La bourgeoisie supporta ce double joug, politique et économique, avec une croissante impatience. Elle était devenue riche et intelligente, beaucoup plus riche et plus intelligente que la noblesse qui la gouvernait et qui la méprisait. Forte de ces deux avantages et soutenue par le peuple, la bourgeoisie se sentait appelée à devenir tout, et elle n’était encore rien. De là la Révolution.

Cette Révolution fut préparée par cette grande littérature du dix-huitième siècle, au moyen de laquelle la protestation philosophique, la protestation politique et la protestation économique, s’unissant dans une réclamation commune, puissante, impérieuse, énoncée hardiment au nom de l’esprit humain, créèrent l’opinion publique révolutionnaire, un engin de destruction bien autrement formidable que tous les chassepots, les fusils à aiguille et les canons perfectionnés d’aujourd’hui. À cette nouvelle puissance rien ne put résister. La Révolution se fit, engloutissant à la fois privilèges nobiliaires, autels et trônes.

12) Cette union si intime des réclamations pratiques avec le mouvement théorique des esprits au dix-huitième siècle établit une différence énorme entre les tendances révolutionnaires de cette époque