Page:Bakounine - Œuvres t3.djvu/375

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C’est ainsi que les positivistes ouvrent la porte aux théologiens et peuvent rester leurs amis dans la vie publique, tout en continuant de faire de l’athéisme scientifique dans leurs livres. Ils agissent en conservateurs politiques et prudents.

Les matérialistes sont révolutionnaires. Ils nient Dieu, ils nient la Cause première. Ils ne se contentent pas de la nier, ils en prouvent l’absurdité et l’impossibilité.

Qu’est-ce que la Cause première ? C’est une cause d’une nature absolument différente de celle de cette quantité innombrable de causes réelles, relatives, matérielles, donc l’action mutuelle constitue la réalité même de l’Univers. Elle |206 rompt, au moins dans le passé, cet enchaînement éternel des causes, sans commencement comme sans terme, dont M. Littré lui-même parle comme d’une chose certaine, ce qui devrait le forcer, ce me semble, à dire aussi que la Cause première, qui en serait nécessairement une négation, est une absurdité. Mais il ne le dit pas. Il dit beaucoup de choses |207 excellentes, mais il ne veut pas dire ces simples paroles, qui auraient rendu désormais tout malentendu impossible : La cause première n’a jamais existé, n’a jamais pu exister. La cause première, c’est une cause qui elle-même n’a point de cause ou qui est cause d’elle-même. C’est l’Absolu créant l’Univers, le pur esprit créant la matière, un non-sens.

Je ne répéterai pas les arguments par lesquels je crois avoir suffisamment démontré que la supposi-