Page:Bakounine - Œuvres t5.djvu/226

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Supposons que mille hommes soient exploités et opprimés par dix.

Que penserait-on si, parmi ces mille hommes, il s’en trouvait vingt, trente, ou davantage, qui se diraient : « Nous sommes fatigués d’être victimes ; mais comme, d’un autre côté, il est ridicule d’espérer le salut de tout le monde, comme la prospérité du petit nombre exige absolument le sacrifice du grand nombre, abandonnons nos camarades à leur sort, et, ne songeant qu’à nous seuls, pour être heureux devenons à notre tour des bourgeois, des exploiteurs ».

Ce serait une trahison, n’est-ce pas ?

Et pourtant voilà précisément ce que nous conseillent nos hommes pratiques ! En théorie aussi bien qu’en pratique, en coopération aussi bien qu’en administration, ils sont par conséquent les exploiteurs et les ennemis de la classe ouvrière. Ils veulent faire leurs affaires, non celles de l’Internationale ; mais, pour mieux faire leurs propres affaires, ils veulent se servir de l’Internationale.

Ce qu’il faut d’ailleurs remarquer, c’est qu’ils méritent cette dénomination d’hommes pratiques, qu’ils se donnent, bien plus par leurs intentions personnelles et bourgeoises que par leur réussite.

Il y en a beaucoup parmi eux qui sont de très bonne foi, qui ne trompent pas, mais se trompent. Ne connaissant pas, n’ayant jamais vu ni imaginé d’autre pratique que la pratique bourgeoise, beau-