Page:Bakounine - Lettres à Herzen et Ogarev, trad. Stromberg, Perrin, 1896.djvu/341

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qu’ayant manqué lui envoyer les 200 francs, nous avons porté préjudice à son decorum, néanmoins il est toujours avec nous. Gambuzzi est un brave gaillard. Il m’écrivait dernièrement que Wassiltchikoff avait tramé contre lui, espérant d’en faire sa dupe ; et il ajoute : « Mais nous allons encore voir qui de nous deux est plus fin, de l’Italien ou du Russe ». Il devient de plus en plus socialiste. Tuccia, qui, bien entendu, avait une peur de diable lors des arrestations à Naples, fait maintenant de son mieux pour complaire à Gambuzzi, bien qu’inutilement. J’ai vu Richard à Genève ; il nous appartient entièrement quoique souvent, il se pose en Français. Bastelica se trouve parmi nos amis espagnols à Barcelone ; son développement marche à toute vapeur. Voici, en peu de mots, un tableau fidèle de notre Alliance. Enfin, notre bonasse Francia, apportant toujours ses consolations à ma femme ; bien que, tranquillement, nous vivons ici sans avoir jamais le sou. Antosia est occupée auprès de ses enfants du matin jusqu’au soir. Elle voulait vous écrire aussi, mais elle est tellement fatiguée, qu’à peine se tient-elle debout. Je travaille beaucoup et je lis les journaux en me posant chaque jour cette question : qui a été battu ?

À présent, mes amis, parlons de vous-mêmes. Je vous remercie de tous les détails que vous me donnez sur votre vie. Je ne désespère pas de vous revoir un jour ; le sort voudra bien nous réunir encore une fois ; en attendant soyons unis par les liens solides de notre affection réciproque, de notre foi et de notre pensée commune. Que ne donnerai-je pas pour vous voir, ne fût-ce que pour quelques instants ? Et Felka ? Il doit être bien grand déjà, il sait courir, ne cesse pas de gazouiller ? La sauvage Ninette, est-elle encore