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REINE D’ARBIEUX

une attitude de froide politesse, ses paupières à demi closes, il laissait crever l’orage sans avoir l’imprudence de risquer un mot.

— Ceux qui ne sont pas contents n’ont qu’à s’en aller, continua Germain, en tournant le dos, sans oser s’exprimer autrement que par des formules générales.

Qu’importait ! Adrien n’était pas un sot. Il devait comprendre. S’il avait un peu d’amour-propre, il serait tout à l’heure dans son bureau pour deman­der des explications. La pensée d’en terminer le matin même, sans motif valable, il est vrai, mais par un de ces actes d’autorité que nul n’a le droit de révoquer — « Charbonnier, n’est-ce pas, est maître chez soi » — fit monter le sang à son visage. Des gouttes d’eau coulaient sous son cano­tier. Il l’enleva et passa son mouchoir sur ses joues.

Mais, quand il fut rentré dans son bureau, qui communiquait avec la pièce où Adrien travaillait habituellement, entre le copie de lettres et le cartonnier, il attendit en vain que sa main toquât à la porte. Sourbets ouvrit son vieux secrétaire à cylindre près de la fenêtre, chercha une liasse de factures dans un tiroir où roulaient des douilles de cartouches. Au bout d’un moment, il les repoussa. Il ne pouvait fixer son esprit. Un nuage de mouches bourdonnait autour d’une bouteille à large panse, montée sur trois pieds, et à moitié emplie d’une eau savonneuse. Il les regarda avec dégoût. Celles qui étaient déjà noyées formaient