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REINE D’ARBIEUX

adroites ; elle, débordant auprès de lui d’idées et de souvenirs.

Que d’heures elle avait passées, étendue sur un canapé au fond du salon, ne pouvant s’occuper d’autre chose que de ces impressions si vives et de ses remords. Bien qu’il n’y eût rien dans leurs rapports de répréhensible, elle avait conscience de ses torts. Dieu ! lorsqu’elle entendait le pas de Germain dans le corridor, ses nerfs se nouaient. Son visage pâlissait sous les larges ondes de ses cheveux. Elle restait immobile, retenait son souffle.

Germain était resté enfermé dans son bureau tout l’après-midi. Les grossièretés de la lettre ano­nyme continuaient de bourdonner à ses oreilles : « Ou’est-ce que cela prouve ? » se répétait-il, cédant au besoin d’apaiser un peu sa souffrance. Mais au fond, quelle disposition à tout mettre au pire !

Il s’était fait apporter les registres, le copie de lettres et les examina, dans le vague espoir d’y trouver quelque irrégularité qui lui eût permis de perdre Adrien. Mais la surexcitation qui succède à un choc moral ne lui permettait pas de fixer son esprit : il tournait les feuilles, ne comprenait rien ! Trois mois avant, pour beaucoup moins, l’ombre d’une ombre, il eût trouvé à accabler Reine un soulagement. Il se fût délivré avec éclat de la colère qui l’étouffait. Et voici que la seule pensée d’abor­der avec elle un pareil sujet lui inspirait une répugnance insurmontable. La chasser aussi ? Il