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REINE D’ARBIEUX

envahi, que son être subissait presque à son insu, et qui faisait ce miracle d’éveiller une jeunesse morte.

La tête baissée, le masque réduit par la volonté qui faisait saillir ses mâchoires, il respirait à longs traits les odeurs de la nuit et lançait sa machine trépidante avec l’ivresse du coureur qui sait le but proche. Dans l’arcade profonde des orbites, ses yeux étaient fixes. Des villages endormis passaient, des vignes, des champs, et la réverbération des lumières d’une grande ville à l’horizon blanchissait le ciel.


XIII


— Je te dis qu’il n’y a personne dans la chambre !

Germain venait de faire une brusque entrée dans la cuisine. Génie, pétrifiée devant la cheminée, des brins de bois dans ses doigts noueux, courbait les épaules. Elle laissait l’orage crever, se sentait perdue. Pendant la nuit, elle s’était levée à plu­sieurs reprises pour frapper à la porte de Reine : mais pas de réponse ! Que pouvait-elle dire quand elle n’avait rien vu ni rien entendu ?

Des larmes débordaient sous ses paupières, rou­laient sur ses joues. Son visage était craintif,