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REINE D’ARBIEUX

Elle se tenait un peu penchée, ne demandait rien. Ce ne sont point des paroles — elle en avait l’intuition secrète — mais quelque chose de fraternel, un refuge humain, que cherche à son insu un homme qui souffre. Celui-là avait-il des torts ? Était-il coupable de quelque faute… lui, ou bien Reine ? Peut-être tous les deux ! Quelle que fût sa tendresse pour son amie, elle se gardait de prendre parti. Parce qu’elle plaignait cet homme malheureux, frappé dans sa jeunesse et dans son orgueil, et que toute souffrance exaltait son cœur, elle sentait couler dans ses veines l’active compassion de celles qui s’inclinent sur des blessés. Savoir d’abord, puis les aider ! Arracher au désespoir leur vie misérable ! Reine pouvait être à la merci de ses impressions, Germain irritable, leur petite société bavarde et intransigeante, il y avait dans leur union une force sacrée qui les sauverait.

— Est-ce qu’elle vous a écrit ces derniers temps ? demanda-t-il soudain.

Puis son âme se desserra, les mots qui semblaient ne devoir jamais passer ses lèvres affluaient d’eux-mêmes.

— Je ne sais pas ce que vous pensez de moi, ni ce que Reine a pu vous dire. C’est possible que je sois une brute. J’ai été violent avec elle… Il me semble même — et elle le vit qui passait la main sur son front, comme pour chasser un mauvais rêve — que je l’ai frappée !

La voix était humble, presque craintive, coupée de silences.