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REINE D’ARBIEUX

une capitulation si douce que quelque chose fondait en lui à cette pensée.

— Non, murmura-t-il d’une voix altérée, maintenant c’est trop tard.

Comme une lueur d’espérance brillait dans les yeux de Reine, qu’elle tenait fixés sur les siens, Régis se sentait faiblir. « Avec elle, songeait-il, la discussion est inutile. » Ah ! il n’aurait jamais cru que le départ lui coûterait cette sueur glacée, que ce serait si dur ! Déjà le pénétrait le froid de l’absence. Le reconnaîtrait-on, quand il reviendrait, avec le visage usé que lui auraient fait l’âge et la colonie ?

Un instant, une joie obscure reflua en lui : puisqu’elle le préférait à tous ceux qu’elle avait connus, lui faisait confiance, pourquoi ne pas garder l’espoir, même séparés, qu’ils seraient unis ? Brève illusion ! La voix de la jeunesse montait aux lèvres de Reine :

— Songez, dit-elle, les plus belles années… les années que rien ne remplace. Je ne sais pas comment font les gens qui se résignent, qui peuvent attendre !

Brusquement, il eut l’impression de se réveiller. Il s’était levé. Elle ne comprit pas, vit seulement que ses yeux s’attachaient à elle avec une expression qui lui fit mal :

— Oui, répéta-t-il, les plus belles années… vous avez raison !

Un roulement d’orage les arracha enfin à eux-mêmes. Un éclair fusa. Les paupières de Reine