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REINE D’ARBIEUX

l’orage s’était dissipé, une quiétude lui succédait, et elle entendait avec un vague bien-être le bruit des cataractes noyant la campagne. Elle aurait aimé faire à Clémence un récit détaillé de la réception qui avait eu lieu à La Font-de-Bonne, dans l’après-midi. Mais la jeune fille se taisait. La lampe posée entre elles éclairait une table craquelée sur laquelle était peint un bouquet d’œillets.

Pendant le dîner, Mme de la Brèche avait parlé de Reine à plusieurs reprises :

— Crois-tu qu’elle ait pu songer à Régis ?

Elle s’en inquiétait avec affection. Une existence attristée par les soucis de santé, les pertes d’argent, n’avait pas terni la douceur sincère de ses yeux et, dans toute sa personne, une bienveillance paisible. Très attachée aux belles relations de sa famille, elle avait déploré le mariage d’Arthur d’Arbieux, mais sans âpreté, gardant au fond de son cœur une tendresse fidèle au frère charmant qui semblait devoir réussir en tout, et n’avait donné aux siens que des déceptions. Quand il était mort, elle l’avait pleuré. Elle était bonne.

— Qu’est-ce que tu en penses ? demanda-t-elle à Clémence qui semblait réfléchir.

Elle lui parla aussi de Sourbets. Depuis la mort de son mari, elle avait pris l’habitude de la consulter. Si la jeune fille, légèrement déviée, de santé délicate, restait l’objet de ses soins constants, elle était par contre devenue — pour les choses sérieuses — son conseil. L’idée qu’elle se faisait de son jugement était la plus haute. Elle aimait pen-