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REINE D’ARBIEUX

Dans l’avenue, comme la voiture tournait sur les pavés inégaux, devant le portail ouvert, elle aper­çut la petite auto rouge rangée près du mur. Un nuage passa sur sa vue. Si Sourbets avait profité de son absence pour parler à Reine, que s’était-il passé ? La jeune fille était bien capable de l’avoir éconduit. Du moins arrivait-elle à temps pour s’interposer. Rien ne serait perdu. La crainte que cette enfant sans expérience s’obstinât à nourrir une chimère, au risque de laisser passer la vie, la fortune, sans vouloir même étendre les mains, et comme eût fait son malheureux père, stimulait l’énergie de son caractère.

M. Sourbets est-il arrivé depuis longtemps ? demanda-t-elle à une métayère qui portait un seau rempli d’eau.

Quand elle entra dans le salon, Germain était debout devant la cheminée, et Reine assise, un peu penchée. Son écharpe avait glissé de ses épaules. Il était très rouge. Elle avait la figure bouleversée. « Quelle bonne surprise ! » dit la vieille dame d’un ton très haut, sans paraître remarquer leur embarras ; avec elle rentraient l’assurance et la fermeté ; et comme elle s’installait dans sa ber­gère, sa jupe un peu remontée sur ses pieds enflés, une complicité joyeuse dilata son visage tourné vers Sourbets :

— Voudriez-vous, monsieur, nous faire le plaisir de dîner dimanche avec nous ?

Le lendemain, Clémence, entrant dans la chambre