Page:Balzac, Chasles, Rabou - Contes bruns, 1832.djvu/20

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boulets ; un homme qui avait dans la tête un code et une épée, la parole et l’action ; esprit perspicace qui a tout deviné, excepté sa chute ; politique bizarre qui jouait les hommes à poignées, par économie, et qui respecta deux têtes, celles de Talleyrand et de Metternich, diplomates dont la mort eût évité la combustion de la France, et qui lui paraissaient peser plus que des milliers de soldats ; homme auquel, par un rare privilége, la nature avait laissé un cœur dans son corps de bronze ; homme, rieur et bon à minuit entre des femmes, et, le matin, maniant l’Europe comme une jeune fille fouette l’eau de son bain !… Hypocrite, généreux, aimant le clinquant, sans goût, et malgré cela grand en tout, par instinct ou par organisation ; César à vingt-deux ans, Cromwell à trente ; puis, comme un épicier du Père La Chaise, bon père et bon époux. Enfin, il a improvisé des monumens, des empires, des rois, des codes, des vers, un roman, et le tout avec plus de portée que de justesse. N’a-t-il pas fait de l’Europe la France ? Et, après nous avoir fait peser sur la terre de manière à changer les lois de la gravitation, il nous a laissés plus pauvres que le jour où il avait mis la main sur nous. Et lui, qui avait pris un