Page:Balzac, Chasles, Rabou - Contes bruns, 1832.djvu/26

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des douleurs. Il se replia sur lui-même, et sut ce que c’étaient que l’air et le soleil ; puis, après une quinzaine de jours, il eut cette maladie terrible, cette fièvre de liberté qui pousse les prisonniers à ces entreprises sublimes dont nous ne pouvons expliquer les prodigieux résultats que par des forces inconnues, par des concentrations de volonté qui font le désespoir de notre analyse physiologique, mystères dont les savans craignent presque de sonder les profondeurs. Mais il se rongeait le cœur ; car il n’y avait que la mort qui pût le rendre libre.

Un matin, le porte-clefs chargé d’apporter la nourriture de Beauvoir, au lieu de s’en aller après lui avoir donné sa maigre pitance, resta devant lui les bras croisés, et le regarda singulièrement. Leur conversation se réduisait de coutume à peu de chose ; et jamais son gardien ne l’entamait. Aussi le chevalier fut-il très-étonné lorsque cet homme lui dit :

— Monsieur, vous avez sans doute votre idée en vous faisant toujours appeler M. Lebrun ou citoyen Lebrun. Cela ne me regarde pas ; mon affaire n’est point de vérifier votre nom : que vous vous no