Page:Balzac, Chasles, Rabou - Contes bruns, 1832.djvu/276

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mouvemens, vous eussiez dit que la santé tout à coup renaissante animait d’une sève nouvelle cette existence délicate, et que la vie, avec ses plaisirs et ses espérances, commençait à déployer pour elle des trésors dont la révélation l’enivrait. L’effet produit par ce mélange et cette lutte de la vie et de la joie avec la mort inévitable me rappelait un tableau assez peu connu de je ne sais quel maître de l’école hollandaise ; ce peintre, plus philosophe que ses patiens rivaux, a représenté un tout petit enfant, qui sourit et qui se joue avec des hochets : étendu sur un blanc linceul, il est entouré de tous les emblèmes de la destruction : un crâne desséché soutient sa petite tête blonde ; un osselet de mort roule entre ses jolis doigts. Le même contraste se trouvait entre cette jeune et naïve innocence et le tombeau qui la réclamait. Rien n’était plus triste ni plus touchant.

Jusqu’aux derniers instans de sa vie, la gaieté de la jeune fille se soutint. Personne ne la vit mourir. Un jour, vers la fin du mois de mai, elle se leva de très-bonne heure et descendit doucement dans le parloir où sa harpe était placée ; ses deux sœurs n’étaient point levées. Sur les dix heures, elles trouvèrent Caroline,