Page:Balzac, Chasles, Rabou - Contes bruns, 1832.djvu/374

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poindre ; espérant que ses premiers rayons achèveraient de rompre tous les enchantemens odieux auxquels il avait été en proie, M. Desalleux se leva et alla ouvrir les persiennes et les rideaux de ses fenêtres, pour laisser pénétrer dans l’appartement la clarté matinale ; alors le malheureux vit pourquoi ce sang ne tarissait point. Emporté par son fougueux courage, dans son duel avec la tête de Pierre Leroux, lorsqu’il croyait frapper sur elle, il avait frappé sur la tête de sa bien-aimée : le coup avait été si rudement porté qu’elle était morte sans même laisser échapper un soupir ; et, à l’heure où il la contemplait, son sang n’avait pas encore fini de couler par une profonde ouverture qu’il lui avait faite à la tempe gauche.

Nous laissons aux physiologistes à expliquer ce phénomène : mais en voyant qu’il avait tué sa femme, il fut saisi d’un accès de rire inextinguible, qui durait encore au moment où sa belle-mère vint frapper à la porte de la chambre, pour savoir comment les époux avaient passé la nuit. Son effroyable gaieté redoubla lorsqu’il entendit la voix de la mère de la défunte. Courant lui ouvrir, il la saisit par le bras ; et, la traînant en face du lit pour qu’elle contemplât bien ce