Page:Balzac, Chasles, Rabou - Contes bruns, 1832.djvu/45

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plus pauvres métairies de la Bretagne. Ces habitations consistent en une seule chambre partagée dans un bout par une cloison en planches, et la plus petite pièce sert de magasin à fourrages. L’obscurité du crépuscule me permettait de voir de loin une légère fumée qui s’échappait de cette maison.

Espérant y trouver des camarades plus compatissans que ceux auxquels je m’étais adressé jusqu’alors, je marchai courageusement jusqu’à la ferme. En y entrant, je trouvai la table mise. Plusieurs officiers, parmi lesquels une femme, spectacle assez ordinaire, mangeaient des pommes de terre, de la chair de cheval grillée sur des charbons et des betteraves gelées. Je reconnus parmi les convives deux ou trois capitaines d’artillerie du premier régiment, dans lequel j’avais servi.

Je fus accueilli par un hourra d’acclamations qui m’aurait fort étonné de l’autre côté de la Bérésina ; mais en ce moment le froid était moins intense ; mes camarades se reposaient, ils avaient chaud, ils mangeaient ; et la salle, jonchée de bottes de paille, leur offrait la perspective d’un bon coucher, d’une nuit de délices. Nous n’en demandions pas tant al