Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1855, tome 18.djvu/364

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bruissement particulier aux forêts ces murmures, ces roucoulements, ces battements d’ailes, l’un des plus délicieux accompagnements de la continuelle mélodie que chante la Nature. Ce lieu tenait donc à la fois au genre inculte des forêts peu pratiquées et à l’élégance d’un parc anglais. L’entourage du pavillon en accord avec son extérieur, offrait au regard je ne sais quoi de noble, de digne et d’aimable ; de même que le bonheur et les soins d’une jeune femme donnaient à l’intérieur une physionomie bien différente de celle que la brutale insouciance de Courtecuisse y imprimait naguère. En ce moment, la saison faisait valoir toutes ces splendeurs naturelles. Les parfums de quelques corbeilles de fleurs se mariaient à la sauvage senteur des bois. Quelques prairies du parc, récemment fauchées à l’entour, répandaient l’odeur des foins coupés.

Lorsque la comtesse et ses deux hôtes atteignirent au bout d’une des allées sinueuses qui débouchaient au pavillon, ils entrevirent madame Michaud assise en dehors, à sa porte, travaillant à une layette. Cette femme, ainsi posée, ainsi occupée, ajoutait au paysage un intérêt humain qui le complétait et qui dans la réalité est si touchant, que certains peintres ont par erreur essayé de le transporter dans leurs tableaux. Ces artistes oublient que l’ esprit d’un pays, quand il est bien rendu par eux, est si grandiose qu’il écrase l’homme, tandis que le cadre d’une semblable scène est, dans la nature, toujours en proportion avec le personnage. Quand le Poussin, le Raphaël de la France, a fait du paysage un accessoire dans ses Bergers d’Arcadie, il avait bien deviné que l’homme devient petit et misérable, lorsque dans une toile la nature est le principal. Là, c’était août dans toute sa gloire, une moisson attendue, un tableau plein d’émotions simples et fortes. Là, se rencontrait réalisé le rêve de beaucoup d’hommes dont la vie inconstante et mélangée de bon et de mauvais par de violentes secousses, leur a fait désirer le repos.

Disons en quelques phrases le roman de ce ménage. Justin Michaud n’avait pas répondu très-chaudement aux avances de l’illustre colonel des cuirassiers, quand Montcornet lui proposa la garde des Aigues, il pensait alors à reprendre du service ; mais au