Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1855, tome 18.djvu/662

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FAIRE FOUR.


Les femmes, et surtout les femmes mariées, se fichent des idées dans leur dure-mère absolument comme elles plantent des épingles dans leur pelote ; et le diable, entendez-vous ? le diable ne les pourrait pas retirer ; elles seules se réservent le droit de les y piquer, de les dépiquer et de les y repiquer.

Caroline est revenue un soir de chez madame Foullepointe dans un état violent de jalousie et d’ambition.

Madame Foullepointe, la lionne… Ce mot exige une explication. C’est le néologisme à la mode, il répond à quelques idées, fort pauvres d’ailleurs, de la société présente : il faut l’employer pour se faire comprendre, quand on veut dire une femme à la mode. Cette lionne donc monte à cheval tous les jours, et Caroline s’est mis en tête d’apprendre l’équitation.

Remarquez que, dans cette phase conjugale, Adolphe et Caroline sont dans cette saison que nous avons nommée le Dix-Huit Brumaire des Ménages, ou qu’ils se sont déjà fait deux ou trois Dernières Querelles.

— Adolphe, dit-elle, veux-tu me faire plaisir ?

— Toujours…

— Tu me refuseras ?

— Mais, si ce que tu me demandes est possible, je suis prêt…

— Ah ! déjà… Voilà bien le mot d’un mari… si…

— Voyons ?

— Je voudrais apprendre à monter à cheval.

— Mais, Caroline, est-ce possible ?

Caroline regarde par la portière, et tente d’essuyer une larme sèche.

— Écoute-moi ? reprend Adolphe : puis-je te laisser aller seule au manége ? puis-je t’y accompagner au milieu des tracas que me donnent en ce moment les affaires ? Qu’as-tu donc ? Je te donne, il me semble, des raisons péremptoires.

Adolphe aperçoit une écurie à louer, l’achat d’un poney, l’introduction au logis d’un groom et d’un cheval de domestique, tous les ennuis de la lionnerie femelle.