Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1855, tome 19.djvu/225

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la tiens sous mes pieds, dans mon palais. Je suis la seule qui ne te volera ni ta gloire, ni ta fortune, ne serait-ce pas me voler moi-même ?

FONTANARÈS.

Comment, c’est toi, Vénitienne maudite !…

FAUSTINE.

Oui… Depuis que tu m’as insultée, ici, j’ai tout conduit : et Magis et Sarpi, et tes créanciers, et l’hôte du Soleil-d’Or, et les ouvriers ! Mais combien d’amour dans cette fausse haine ! N’as-tu donc pas été réveillé par une larme, la perle de mon repentir, tombée de mes paupières, durant ton sommeil, quand je t’admirais, toi, mon martyr adoré !

FONTANARÈS.

Non, tu n’es pas une femme…

FAUSTINE.

Ah ! il y a plus qu’une femme, dans une femme qui aime ainsi.

FONTANARÈS.

… Et, comme tu n’es pas une femme, je puis te tuer.

FAUSTINE.

Pourvu que ce soit de ta main ! (À part.) Il me hait !

FONTANARÈS.

Je cherche…

FAUSTINE.

Est-ce quelque chose que je puisse trouver ?

FONTANARÈS.

… Un supplice aussi grand que ton crime.

FAUSTINE.

Y a-t-il des supplices pour une femme qui aime? Éprouve- moi, va !

FONTANARÈS.

Tu m’aimes, Faustine, suis-je bien toute ta vie ? Mes douleurs sont-elles bien les tiennes.

FAUSTINE.

Une douleur chez toi devient mille douleurs chez moi.

FONTANARÈS.

Si je meurs, tu mourras… Eh bien ! quoique ta vie ne vaille pas l’amour que je viens de perdre, mon sort est fixé.

FAUSTINE.

Ah !