Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1855, tome 19.djvu/245

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JULES.

Et vous verrez…

PAMÉLA.

Êtes-vous dans votre bon sens, monsieur Adolphe ? Après m’avoir suivie depuis un mois, m’avoir vue deux fois au bal, et m’avoir écrit des déclarations comme les jeunes gens de votre sorte en font à toutes les femmes, vous venez me proposer de but en blanc un enlèvement ?

JULES.

Ah ! mon Dieu ! pas un instant de retard ! vous vous repentiriez de ceci toute votre vie, et vous vous apercevrez trop tard de la perte que vous aurez faite.

PAMÉLA.

Mais, Monsieur, tout peut se dire en deux mots.

JULES.

Non… quand il s’agit d’un secret d’où dépend la vie de plusieurs hommes.

PAMÉLA.

Mais, Monsieur, s’il s’agit de vous sauver la vie, quoique je n’y comprenne rien, et qui que vous soyez, je ferai bien des choses ; mais de quelle utilité puis-je vous être dans votre fuite ? pourquoi m’emmener en Angleterre ?

JULES.

Mais, enfant !… l’on ne se défie pas de deux amants qui s’enfuient !… et enfin, je vous aime assez pour oublier tout, et encourir la colère de mes parents… une fois mariés à Gretna-Green…

PAMÉLA.

Ah ! mon Dieu !… moi, je suis toute bouleversée ! un beau jeune homme qui vous presse… vous supplie… et qui parle d’épouser.

JULES.

On monte… Je suis perdu !… vous m’avez livré !

PAMÉLA.

Monsieur Adolphe, vous me faites peur ! que peut-il donc vous arriver ?… Attendez… je vais voir.

JULES.

En tout cas, prenez ces vingt mille francs sur vous, ils seront plus en sûreté qu’entre les mains de la justice… Je n’avais qu’une demi-heure… et… tout est dit !

PAMÉLA.

Ne craignez rien… c’est mon père et ma mère !…