Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1855, tome 19.djvu/361

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entendu, je te pardonne le mal que tu m’as fait en m’apprenant que je ne suis pas ton premier, ton seul amour, comme tu es le mien… C’est une illusion perdue, que veux-tu ? Ne te fâche pas ? Les jeunes filles sont folles, elles n’ont d’ambition que dans leur amour, et elles voudraient avoir le passé comme elles ont l’avenir de celui qu’elles aiment ! Tu la hais ! voilà pour moi plus d’amour dans une parole que toutes les preuves que tu m’en a données en deux ans. Si tu savais avec quelle cruauté cette marâtre m’a mise à la question ! Je me vengerai !

FERDINAND.

Prends garde ! elle est bien dangereuse ! Elle gouverne ton père ! elle est femme à livrer un combat mortel !

PAULINE.

Mortel ! c’est ce que je veux.

FERDINAND. De la prudence, ma chère Pauline Nous voulons être l’un à l’autre, n’est-ce pas ?… eh bien ! mon amie, le procureur du roi est d’avis que, pour triompher des difficultés qui nous séparent, il faut avoir la force de nous quitter pendant quelque temps.

PAULINE.

Oh ! donne-moi deux jours, et j’aurai tout obtenu de mon père.

FERDINAND.

Tu ne connais pas madame de Grandchamp. Elle a trop fait pour ne pas te perdre, et elle osera tout. Aussi ne partirai-je pas sans te donner des armes terribles contre elle.

PAULINE.

Donne, donne !

FERDINAND.

Pas encore. Promets-moi de n’en faire usage que si ta vie est menacée, car c’est un crime contre la délicatesse que je commettrai ! Mais il s’agit de toi.

PAULINE.

Qu’est-ce donc ?

FERDINAND.

Les lettres qu’elle m’a écrites avant son mariage et quelques-unes après… Je te les remettrai demain. Pauline, ne les lis pas ! jure-le moi par notre amour, par notre bonheur ! Il suffira, si la nécessité le voulait absolument, qu’elle sache que tu les as en ta