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ACTE CINQUIÈME

La chambre de Pauline.


Scène première.

PAULINE, FERDINAND, VERNON.
Pauline est étendue dans son lit. Ferdinand tient se main dans une pose de douleur et d’abandon complet. C’est le moment du crépuscule, il y a encore une lampe.
VERNON, assis près du guéridon.

J’ai vu des milliers de morts sur le champ de bataille, aux ambulances ; et pourquoi la mort d’une jeune fille sous le toit paternel me fait-elle plus d’impression que tant de souffrances héroïques ?… La mort est peut-être un cas prévu sur le champ de bataille… on y compte même ; tandis qu’ici il ne s’agit pas seulement d’une existence, c’est toute une famille que l’on voit en larmes, et des espérances qui meurent… Voilà cette enfant, que je chérissais, assassinée, empoisonnée… et par qui ?… Marguerite a bien deviné l’énigme de cette lutte entre ces deux rivales… Je n’ai pas pu m’empêcher d’aller tout dire à la justice… Pourtant, mon Dieu, j’ai tout tenté pour arracher cette vie à la mort ?… (Ferdinand relève la tête et écoute le docteur.) J’ai même apporté ce poison qui pourrait neutraliser l’autre ; mais il aurait fallu le concours des princes de la science ! On n’ose pas tout seul un pareil coup de dé.

FERDINAND se lève et va au docteur.

Docteur, quand les magistrats seront venus, expliquez-leur cette tentative, ils la permettront ; et, tenez, Dieu, Dieu m’écoutera… il fera quelque miracle, il me la rendra !…

VERNON.

Avant que l’action du poison n’ait exercé tous ses ravages, j’au-