Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 11.djvu/33

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Nucingen et du Tillet accompagnèrent le défunt au cimetière. Le vieux valet de chambre allait à pied. Le cocher menait la voiture derrière celle du Clergé. — Hé pien ! ma ponne ami, dit Nucingen à du Tillet en tournant le boulevard, location est pelle bire ebiser Malfina : fous serez le brodecdir teu zette baufre vamile han plires, visse aurez eine vamile, ine indérière ; fous drouferez eine mison doute mondée, et Malfina cerdes esd eine frai dressor.

— Il me semble entendre parler ce vieux Robert Macaire de Nucingen ! dit Finot.

« — Une charmante personne, reprit Ferdinand du Tillet avec feu et sans s’échauffer, » reprit Bixiou.

— Tout du Tillet dans un mot ! s’écria Couture.

« — Elle peut paraître laide à ceux qui ne la connaissent pas, mais, je l’avoue, elle a de l’âme, disait du Tillet. — Ed tu quir, c’esd le pon te l’iffire, mon cher, il aura ti téfuement et te l’indelligence. Tans nodre chin te médier, on ne said ni ki fit, ni ki mire ; c’esd eine crant ponhire ki te pufoir se gonvier au quir te sa femme. Che droguerais bienne Telvine qui, fous le safez, m’a abordé plis d’eine million gondre Malfina qui n’a pas ine taude si crante. — Mais qu’a-t-elle ? — Che ne sais bas au chiste, dit le baron de Nucingen, mais il a keke chausse. — Elle a une mère qui aime bien le rose ! » dit du Tillet. Ce mot mit fin aux tentatives de Nucingen. Après le dîner, le baron apprit alors à la Wilhelmine-Adolphus qu’il lui restait à peine quatre cent mille francs chez lui. La fille des Adolphus de Manheim, réduite à vingt-quatre mille livres de rente, se perdit dans des calculs qui se brouillaient dans sa tête. « — Comment ! disait-elle à Malvina, comment ! j’ai toujours eu six mille francs pour nous chez la couturière ! mais où ton père prenait-il de l’argent ? Nous n’aurons rien avec vingt-quatre mille francs, nous sommes dans la misère. Ah ! si mon père me voyait ainsi déchue, il en mourrait, s’il n’était pas mort déjà ! Pauvre Wilhelmine ! » Et elle se mit à pleurer. Malvina, ne sachant comment consoler sa mère, lui représenta qu’elle était encore jeune et jolie, le rose lui seyait toujours, elle irait à l’Opéra, aux Bouffons dans la loge de madame de Nucingen. Elle endormit sa mère dans un rêve de fêtes, de bals, de musique, de belles toilettes et de succès, qui commença sous les rideaux d’un lit en soie bleue, dans