Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 13.djvu/54

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Mène-à-bien se gratta l’oreille et regarda derrière lui, mais ses nouveaux camarades avaient complètement disparu.

Hulot et ses soldats s’arrêtèrent à Ernée pour déposer les blessés à l’hôpital de cette petite ville ; puis, sans que nul événement fâcheux interrompît la marche des troupes républicaines, elles arrivèrent à Mayenne. Là le commandant put, le lendemain, résoudre tous ses doutes relativement à la marche du messager ; car le lendemain, les habitants apprirent le pillage de la voiture.

Peu de jours après, les autorités dirigèrent sur Mayenne assez de conscrits patriotes pour que Hulot pût y remplir le cadre de sa demi-brigade. Bientôt se succédèrent des ouï-dire peu rassurants sur l’insurrection. La révolte était complète sur tous les points où, pendant la dernière guerre, les Chouans et les Vendéens avaient établi les principaux foyers de cet incendie. En Bretagne, les royalistes s’étaient rendus maîtres de Pontorson, afin de se mettre en communication avec la mer. La petite ville de Saint-James, située entre Pontorson et Fougères, avait été prise par eux, et ils paraissaient vouloir en faire momentanément leur place d’armes, le centre de leurs magasins ou de leurs opérations. De là, ils pouvaient correspondre sans danger avec la Normandie et le Morbihan. Les chefs subalternes parcouraient ces trois pays pour y soulever les partisans de la monarchie et arriver à mettre de l’ensemble dans leur entreprise. Ces menées coïncidaient avec les nouvelles de la Vendée, où des intrigues semblables agitaient la contrée, sous l’influence de quatre chefs célèbres, messieurs l’abbé Vernal, le comte de Fontaine, de Châtillon et Suzannet. Le chevalier de Valois, le marquis d’Esgrignon et les Troisville étaient, disait-on, leurs correspondants dans le département de l’Orne. Le chef du vaste plan d’opérations qui se déroulait lentement, mais d’une manière formidable, était réellement le Gars, surnom donné par les Chouans à monsieur le marquis de Montauran, lors de son débarquement. Les renseignements transmis aux ministres par Hulot se trouvaient exacts en tout point. L’autorité de ce chef envoyé du dehors avait été aussitôt reconnue. Le marquis prenait même assez d’empire sur les Chouans pour leur faire concevoir le véritable but de la guerre et leur persuader que les excès dont ils se rendaient coupables souillaient la cause généreuse qu’ils avaient embrassée. Le caractère hardi, la bravoure, le sang-froid, la capacité de ce jeune seigneur réveillaient les espérances des ennemis de la République et