Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 15.djvu/108

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triomphe, et dont les phrases se trouveront développées au troisième acte, dans la scène où Mahomet savoure les délices de sa grandeur.

En ce moment des pleurs vinrent aux yeux de Gambara, qui, après un moment d’émotion, s’écria : -- DEUXIEME ACTE ! Voici la religion instituée. Les Arabes gardent la tente de leur prophète qui consulte Dieu (chœur en la mineur). Mahomet paraît (prière en fa). Quelle brillante et majestueuse harmonie plaquée sous ce chant où j’ai peut-être reculé les bornes de la mélodie. Ne fallait-il pas exprimer les merveilles de ce grand mouvement d’hommes qui a créé une musique, une architecture, une poésie, un costume et des mœurs ? En l’entendant, vous vous promenez sous les arcades du Généralife, sous les voûtes sculptées de l’Alhambra ! Les fioritures de l’air peignent la délicieuse architecture moresque et les poésies de cette religion galante et guerrière qui devait s’opposer à la guerrière et galante chevalerie des chrétiens ? Quelques cuivres se réveillent à l’orchestre et annoncent les premiers triomphes (par une cadence rompue). Les Arabes adorent le prophète (mi bémol majeur). Arrivée de Khaled, d’Amrou et d’Ali par un tempo di marcia. Les armées des Croyants ont pris des villes et soumis les trois Arabies ! Quel pompeux récitatif ! Mahomet récompense ses généraux en leur donnant ses filles. (Ici, dit-il d’un air piteux, il y a un de ces ignobles ballets qui coupent le fil des plus belles tragédies musicales !) Mais Mahomet (si mineur) relève l’opéra par sa grande prophétie, qui commence chez ce pauvre monsieur de Voltaire par ce vers :

Le temps de l’Arabie est à la fin venu.

Elle est interrompue par le chœur des Arabes triomphants (douze-huit accéléré). Les clairons, les cuivres reparaissent avec les tribus qui arrivent en foule. Fête générale où toutes les voix concourent l’une après l’autre, et où Mahomet proclame sa polygamie. Au milieu de cette gloire, la femme qui a tant servi Mahomet se détache par un air magnifique (si majeur). « Et moi, dit-elle, moi, ne serais-je donc plus aimée ? -- Il faut nous séparer ; tu es une femme, et je suis un prophète ; je puis avoir des esclaves, mais plus d’égal ! » Ecoutez ce duo (sol dièse mineur). Quels déchirements ! La femme comprend la grandeur qu’elle a élevée de ses mains, elle aime assez Mahomet pour se sacrifier à sa gloire, elle l’adore