Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 15.djvu/561

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outrer son ébahissement, en sorte que son attitude niaise devant le corps de garde lui fut un excellent passe-port aux yeux de Pardaillan.

— La reine n’est pas levée, dit le jeune capitaine, viens l’attendre dans la salle des gardes.

Christophe suivit Pardaillan assez lentement. Il fit exprès d’admirer la jolie galerie découpée en arcade où, sous le règne de Louis XII, les courtisans attendaient l’heure des réceptions à couvert quand il faisait mauvais temps, et où se trouvaient alors quelques seigneurs attachés aux Guise, car l’escalier, si bien conservé de nos jours, qui menait à leurs appartements, est au bout de cette galerie dans une tour que son architecture recommande à l’admiration des curieux.

— Hé ! bien, es-tu venu pour faire des études de tailleur d’images ? cria Pardaillan en voyant Lecamus arrêté devant les jolies sculptures des tribunes extérieures qui réunissent ou, si vous voulez, qui séparent les colonnes de chaque arcade.

Christophe suivit le jeune capitaine vers l’escalier d’honneur, non sans avoir mesuré cette tour quasi-moresque par un regard d’extase. Par cette belle matinée, la cour était pleine de capitaines d’ordonnance, de seigneurs qui causaient par groupes, et dont les brillants costumes animaient ce lieu que les merveilles de l’architecture répandues sur sa façade encore neuve rendaient déjà si brillant.

— Entre là, dit Pardaillan à Lecamus en lui faisant signe de le suivre par la porte en bois sculpté du deuxième étage et qu’un garde de la porte ouvrit en reconnaissant Pardaillan.

Chacun peut se figurer l’étonnement de Christophe en entrant dans cette salle des gardes, alors si vaste, qu’aujourd’hui le Génie militaire l’a divisée en deux par une cloison pour en faire deux chambrées ; elle occupe en effet au second étage chez le roi, comme au premier chez la reine-mère, le tiers de la façade sur la cour, car elle est éclairée par deux croisées à gauche et deux croisées à droite de la tour où se développe le fameux escalier. Le jeune capitaine alla vers la porte de la chambre de la reine et du roi qui donnait dans cette vaste salle, et dit à l’un des deux pages de service d’avertir madame Dayelle, une des femmes de chambre de la reine, que le pelletier était dans la salle avec ses surcots.

Sur un geste de Pardaillan, Christophe alla se mettre près d’un