Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 16.djvu/283

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de son corps éblouissait, jamais les formes humaines ne seront si parfaites, et il disait : — « Je suis le Plaisir, et tu me posséderas ! » Lucifer, le prince des serpents, est venu dans son appareil de souverain, l’Homme était en lui beau comme un ange, et il a dit : — « L’Humanité te servira ! » La reine des avares, celle qui ne rend rien de ce qu’elle a reçu, la Mer est venue enveloppée de sa mante verte ; elle s’est ouvert le sein, elle a montré son écrin de pierreries, elle a vomi ses trésors et les a offerts ; elle a fait arriver des vagues de saphirs et d’émeraudes ; ses productions se sont émues, elles ont surgi de leurs retraites, elles ont parlé ; la plus belle d’entre les perles a déployé ses ailes de papillon, elle a rayonné, elle a fait entendre ses musiques marines, elle a dit : — « Toutes deux filles de la souffrance, nous sommes sœurs ; attends-moi ? nous partirons ensemble, je n’ai plus qu’à devenir femme. » L’Oiseau qui a les ailes de l’aigle et les pattes du lion, une tête de femme et la croupe du cheval, l’Animal s’est abattu, lui a léché les pieds, promettant sept cents années d’abondance à sa fille bien-aimée. Le plus redoutable, l’Enfant, est arrivé jusqu’à ses genoux en pleurant et lui disant : — « Me quitteras-tu ? moi faible et souffrant, reste, ma mère ! » Il jouait avec les autres, il répandait la paresse dans l’air, et le ciel se serait laissé aller à sa plainte. La Vierge au chant pur a fait entendre ses concerts qui détendent l’âme. Les rois de l’Orient sont venus avec leurs esclaves, leurs armées et leurs femmes ; les Blessés ont demandé son secours, les Malheureux ont tendu la main : — « Ne nous quittez pas ! ne nous quittez pas ! » Moi-même j’ai crié : « Ne nous quittez pas ! Nous vous adorerons, restez ! » Les fleurs sont sorties de leurs graines en l’entourant de leurs parfums qui disaient : — « Restez ! » Le géant Énakim est sorti de Jupiter, amenant l’Or et ses amis, amenant les Esprits des Terres Astrales qui s’étaient joints à lui, tous ont dit : — « Nous serons à toi pour sept cents années. » Enfin, la Mort est descendue de son cheval pâle et a dit : — « Je t’obéirai ! » Tous se sont prosternés à ses pieds, et si vous les aviez vus, ils remplissaient la grande plaine, et tous lui criaient : — « Nous t’avons nourri, tu es notre enfant, ne nous abandonne pas. » La Vie est sortie de ses Eaux Rouges, et a dit : — « Je ne te quitterai pas ! » Puis trouvant Séraphîta silencieuse elle a relui comme le soleil en s’écriant : — « Je suis la lumière ! » — La lumière est là ! s’est écriée Séraphîta en montrant les nuages où s’agitaient les ar-