Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 16.djvu/381

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Oui, celles qui n’ont jamais été tentées et celles qui meurent à leurs premières couches, en supposant que leurs maris les aient épousées vierges.

Oui, celles qui sont laides comme la Kaïfakatadary des Mille et une Nuits.

Oui, celles que Mirabeau appelle les fées concombres, et qui sont composées d’atomes exactement semblables à ceux des racines de fraisier et de nénuphar ; cependant, ne nous y fions pas !…

Puis, avouons, à l’avantage du siècle, que, depuis la restauration de la morale et de la religion, et, par le temps qui court, on rencontre éparses quelques femmes si morales, si religieuses, si attachées à leurs devoirs, si droites, si compassées, si roides, si vertueuses, si… que le Diable n’ose seulement pas les regarder ; elles sont flanquées de rosaires, d’heures et de directeurs… Chut !

Nous n’essaierons pas de compter des femmes vertueuses par bêtise, il est reconnu qu’en amour toutes les femmes ont de l’esprit.

Enfin, il ne serait cependant pas impossible qu’il y eût, dans quelque coin, des femmes jeunes, jolies et vertueuses de qui le monde ne se doute pas.

Mais ne donnez pas le nom de femme vertueuse à celle qui, combattant une passion involontaire, n’a rien accordé à un amant qu’elle est au désespoir d’idolâtrer. C’est la plus sanglante injure qui puisse être faite à un mari amoureux. Que lui reste-t-il de sa femme ? Une chose sans nom, un cadavre animé. Au sein des plaisirs, sa femme demeure comme ce convive averti par Borgia, au milieu du festin, que certains mets sont empoisonnés : il n’a plus faim, mange du bout des dents, ou feint de manger. Il regrette le repas qu’il a laissé pour celui du terrible cardinal, et soupire après le moment où, la fête étant finie, il pourra se lever de table.

Quel est le résultat de ces réflexions sur la vertu féminine ? Le voici ; mais les deux dernières maximes nous ont été données par un philosophe éclectique du dix-huitième siècle.


XVIII.

Une femme vertueuse a dans le cœur une fibre de moins ou de plus que les autres femmes : elle est stupide ou sublime.


XIX.

La vertu des femmes est peut-être une question de