Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 16.djvu/462

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et Pierrot donnent à leur petit chapeau blanc ? ils le tournent et retournent si bien, que successivement ils en font une toupie, un bateau, un verre à boire, une demi-lune, un berret, une corbeille, un poisson, un fouet, un poignard, un enfant, une tête d’homme, etc.

Image exacte du despotisme avec lequel vous devez manier et remanier votre femme.

La femme est une propriété que l’on acquiert par contrat, elle est mobilière, car la possession vaut titre ; enfin, la femme n’est, à proprement parler, qu’une annexe de l’homme ; or, tranchez, coupez, rognez, elle vous appartient à tous les titres. Ne vous inquiétez en rien de ses murmures, de ses cris, de ses douleurs ; la nature l’a faite à notre usage et pour tout porter : enfants, chagrins, coups et peines de l’homme.

Ne nous accusez pas de dureté. Dans tous les codes des nations soi-disant civilisées, l’homme a écrit les lois qui règlent le destin des femmes sous cette épigraphe sanglante : Væ victis ! Malheur aux faibles.

Enfin, songez à cette dernière observation, la plus prépondérante peut-être de toutes celles que nous avons faites jusqu’ici : si ce n’est pas vous, mari, qui brisez sous le fléau de votre volonté ce faible et charmant roseau ; ce sera, joug plus atroce encore, un célibataire capricieux et despote ; elle supportera deux fléaux au lieu d’un. Tout compensé, l’humanité vous engagera donc à suivre les principes de notre hygiène.

MÉDITATION XIII.

DES MOYENS PERSONNELS.

Peut-être les Méditations précédentes auront-elles plutôt développé des systèmes généraux de conduite, qu’elles n’auront présenté les moyens de repousser la force par la force. Ce sont des pharmacopées et non pas des topiques. Or, voici maintenant les moyens personnels que la nature vous a mis entre les mains, pour vous défendre ; car la Providence n’a oublié personne : si elle a donné à la seppia (poisson de l’Adriatique) cette couleur noire qui lui sert à produire un nuage au sein duquel elle se dérobe à son ennemi, vous devez bien penser qu’elle n’a pas laissé un mari sans épée : or, le moment est venu de tirer la vôtre.