Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 17.djvu/137

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le baron Hulot. Célestin Crevel fut aimable, il fut toujours un peu trop ancien parfumeur ; mais il commençait à s’élever au majestueux à force d’être chef de bataillon. Il parla de danser à la noce.

— Belle dame, dit-il gracieusement à la baronne Hulot, des gens comme nous savent tout oublier : ne me bannissez pas de votre intérieur, et daignez embellir quelquefois ma maison en y venant avec vos enfants. Soyez calme, je ne vous dirai jamais rien de ce qui gît au fond de mon cœur. Je m’y suis pris comme un imbécile, car je perdais trop à ne plus vous voir…

— Monsieur, une honnête femme n’a pas d’oreilles pour les discours auxquels vous faites allusion ; et si vous tenez votre parole, vous ne devez pas douter du plaisir que j’aurai à voir cesser une division toujours affligeante dans les familles…

— Hé bien ! gros boudeur, dit le baron Hulot en emmenant de force Crevel dans le jardin, tu m’évites partout, même dans ma maison. Est-ce que deux vieux amateurs du beau sexe doivent se brouiller pour un jupon ? Allons, vraiment, c’est épicier.

— Monsieur, je ne suis pas aussi bel homme que vous, et mon peu de moyens de séduction m’empêche de réparer mes pertes aussi facilement que vous le faites…

— De l’ironie ! répondit le baron.

— Elle est permise contre les vainqueurs quand on est vaincu.

Commencée sur ce ton, la conversation se termina par une réconciliation complète ; mais Crevel tint à bien constater son droit de prendre une revanche.

Madame Marneffe voulut être invitée au mariage de mademoiselle Hulot. Pour voir sa future maîtresse dans son salon, le Conseiller d’État fut obligé de prier les employés de sa Division jusqu’aux sous-chefs inclusivement. Un grand bal devint alors nécessaire. En bonne ménagère, la baronne calcula qu’une soirée coûterait moins cher qu’un dîner, et permettrait de recevoir plus de monde. Le mariage d’Hortense fit donc grand tapage.

Le maréchal prince de Wissembourg et le baron de Nucingen du côté de la future, les comtes de Rastignac et Popinot du côté de Steinbock, furent les témoins. Enfin, depuis la célébrité du comte de Steinbock, les plus illustres membres de l’émigration polonaise l’ayant recherché, l’artiste crut devoir les inviter. Le Conseil-d’État, l’Administration dont faisait partie le baron, l’Armée qui vou-